jeudi 20 janvier 2011

Laurent Gaudé : OURAGAN, Actes Sud, 2010

Un ouragan, et pas n'importe lequel, celui qui a ravagé la Nouvelle-Orléans, Katrina. Après la couverture médiatique dont il a fait l'objet, on pourrait croire qu'il n'y avait plus rien à dire sur le sujet. Eh bien détrompez-vous. Laurent Gaudé prend le parti de s'attacher à une dizaine de personnages, qu'il va faire se croiser au gré du déroulement de son récit.

Tout débute par une "lointaine odeur de chienne" perçue par une vieille négresse centenaire, qui ne vit pas là l'épisode le plus mouvementé de sa longue vie de femme  et qui restera debout jusqu'à la fin. Alors que l'ouragan se prépare et que les habitants, du moins ceux qui le peuvent, fuient la ville,   un homme roule en sa direction, décidé à retrouver la seule femme qui ait compté pour lui. Cette dernière est paniquée à l'idée de le revoir, trop consciente de la déchéance dans laquelle elle est tombée depuis leur séparation. A côté d'elle, son fils, continue à se taire et à refuser tout contact avec les autres humains. Un pasteur réunit ses ouailles dans l'église pour les protéger des rafales du vent, des prisonniers s'inquiètent de se voir abandonnés par leurs gardiens.


"Le vent ne cesse de forcir. C'est nous qu'il veut. Il souffle pour nous arracher, nous soulever de terre et nous faire danser dans les airs au-dessus de cette ville qui ne sera bientôt plus rien. Je reste à la fenêtre. Je la sens qui tremble et crisse. Tant pis si elle éclate à ma face de négresse, je ne bougerai pas d'ici, car je suis bien. Le monde va se déchirer comme un sac et je veux voir ça."


Et l'ouragan s'abat sur la ville, les digues cèdent, les quartiers nord sont inondés, les prisonniers voient l'eau monter dans leurs cellules, les crocodiles ne vont pas tarder à s'engager dans les rues transformées en marais. Le chaos s'installe. La vie de ceux qui sont restés coincés dans la ville désertée peut basculer.


Laurent Gaudé nous raconte ce que la télévision ne pouvait pas nous montrer et cela dans un style qui s'identifie aux tourbillons du vent, qui mêlent les pensées, les actes des différents protagonistes, qui les soulèvent vers des sommets de peur, d'angoisse, de folie, de sauvagerie, de persévérance et même d'un immense bonheur.

C'est un livre magnifiquement écrit, qui nous embarque dès les premières pages et ne nous laisse aucun répit, pris que nous sommes dans la fureur des éléments et du récit.

3 commentaires:

  1. Tu en as fait un résumé particulièrement poignant, Amartia, ce doit être un livre très fort...
    Merci encore une fois pour tes lectures !

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  2. Et oui ! On croche dès les premières lignes ... j'espère que Gaudé écrit aussi bien que toi !

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  3. Bonsoir. J'ai très envie de lire ce livre que je vais emprunter à la BM. Dans la même veine j'ai lu "Zola Jackson" de Gilles Leroy : Katrina est passée et Zola, ancienne maîtresse d'école, est seule dans sa maison où l'eau monte, monte .....Elle organise sa survie. Beaucoup de souvenirs reviennent à sa mémoire. Livre très émouvant. Et il y a aussi son chien .......

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